"Je vais t’écrire mon deuxième prénom aussi, sinon, les gens croient que je suis un homme". Pourtant, quand on rencontre Rocio Judith Machorro, c’est sa féminité qui saute aux yeux. Rocio nous reçoit dans son studio. Assise dans la position du lotus, ses longs cheveux noir tombant sur son dos, la professeure de yoga nous regarde au fond des yeux, toujours avec bienveillance. Une bienveillance qui ne la quitte pas lorsque débute son cours de yoga. "J’ai des besoins très particuliers et c’est que je cherche chez mes élèves. C’est très important, car les besoins individuels sont souvent négligés dans notre société, mais je crois qu’il est possible de les exprimer en groupe". C’est pour ça que chacun de ses cours est différent. "Pendant ma première année d’enseignement, en 2002, j’ai enseigné le Ashtanga yoga à la lettre, mais j’ai réalisé que ça me rendais malheureuse. Depuis, je sors du cours classique, je me suis réconciliée avec ma nature rebelle".
Têtue... et libre
Professeure de français seconde langue au Mexique, Rocio arrive au Québec en 1991. "J'enseignais le français depuis 10 ans mais je n'étais jamais allée dans un pays francophone. Un jour, un ami m'a parlé de Montréal et du Québec. Je n'y avais jamais pensé! Pourtant c'est sur le même continent que le Mexique, et ça m'a paru possible, contrairement à la France et l'Europe, où c'est un océan qu'il faut traverser". Rocio postule alors à une bourse pour venir à l'université de Montréal. Elle la décroche, et la voilà qui s'envole vers Montréal, pour trois mois. Elle postule ensuite à une seconde bourse, pour six mois cette fois. Et très vite, la Bélier ascendant Bélier qu'elle est décide de rester dans cette ville qu'elle adore. Rocio décide de faire venir ses deux filles, alors toutes petites. "J'aime beaucoup Montréal. C'est francophone, et puis la vie est vraiment très agréable. Quand tu sors du centre ville, les gens sont détendus, les voitures s'arrêtent pour te laisser traverser!" Son premier hiver à Montréal? "C'était vraiment fou toute cette neige!"
La difficulté de vivre avec la douleur
A Montréal, Rocio est d’abord libraire pendant 15 ans. "La spiritualité m’a toujours intéressé. Travailler dans cette librairie a été un moyen d’apprendre beaucoup, de lire toute sorte de livres sur la méditation et la spiritualité".
A 48 ans, Rocio en paraît 10 de moins. Son dos, lui, est fragile. "J’ai toujours eu mal au dos. Depuis l’adolescence, je souffre d’une scoliose lombaire, au point d’avoir eu des crises pendant lesquelles je ne pouvais pas marcher". Alors Rocio a exploré. Danse contemporaine dans une troupe pendant 10 ans, une autre décennie d’arts martiaux, natation intensive pendant 4 ans… Et toujours ces crises. Petit à petit, alors que ses deux filles entrent dans l’adolescence, Rocio fait du yoga sans même le savoir. Lors d’une crise, elle reste clouée au lit pendant deux semaines. Très occupée par ses activités, "je me suis dit qu’il fallait que je reste plus chez moi, avec mes filles". Rocio cherche alors comment s’appelle cet art où elle fait des postures et des étirements qui la soulagent. "J’ai toujours fait des recherches spirituelles parce que c’est difficile de vivre avec la douleur. Avec le yoga, j’ai trouvé ce qui me fait du bien. Je ressens mon corps de l’intérieur, je respire dans mes douleurs". Les crises qui l’empêchaient de marcher ont disparu. Le yoga aujourd’hui, elle en vit. Et il lui fait du bien.
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Romarin